Alexandre Soljenitsyne explique donc comment il a exercé sa mémoire :
" A l’âge de 18-19 ans, je voulais écrire sur la Révolution russe :
j’ai commencé à écrire quelques épisodes d’Août 14 mais
les circonstances de la
vie — la guerre, la prison, le camp — m’ont empêché de continuer :
je n’avais plus de sources. Je devais faire autre chose, changer de thème.
J’ai écrit des poèmes : c’était facile à mémoriser. Des petits poèmes
de vingt lignes notés sur des bouts de papier, que j’apprenais par cœur et
que je brûlais ensuite. A la fin de la période de prison et de camp,
j’avais 12 000 lignes en mémoire. Deux fois par mois, je devais répéter ce
grand volume de poèmes pendant dix jours.[...] J’avais un chapelet :
chaque grain représentait un poème ; je le portais dans mon gant. Si on
trouvait ce chapelet pendant la fouille, je disais prier : on ne faisait
pas attention, ce n’était pas une arme ! "